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Association internationale des pompiers FAT-COI, CTC

Mémoire adressé au Comité permanent des finances dans le cadre des consultations prébudgétaires 2012

Août 2011

Sommaire

L’Association internationale des pompiers (AIP) représente plus de 21 000 pompiers professionnels au Canada, c'est-à-dire des hommes et des femmes qui risquent chaque jour leur vie pour protéger la vie et les biens matériels de leurs concitoyens.

Les pompiers professionnels protègent 85 % de la population canadienne et des infrastructures nationales. Ils sont quasiment toujours les premiers à intervenir dans une situation d'urgence, qu'il s'agisse d'un incendie nécessitant le sauvetage de personnes et la maîtrise du sinistre, d'une urgence médicale comme une crise cardiaque, ou d'un accident automobile ou industriel nécessitant le dégagement des victimes.

Les pompiers sont aussi les premiers à arriver sur les lieux en cas d'urgence due à des produits toxiques, y compris les substances chimiques, biologiques, radiologiques, nucléaires et explosives (CBRNE), qu'elle ait été provoquée par un accident automobile ou industriel, par un désastre naturel ou par un acte de terrorisme. Les pompiers professionnels sont la première ligne de défense du Canada et font partie intégrante du dispositif d'urgence du pays.

L’AIP est heureuse d'avoir la possibilité de faire connaître son point de vue au Comité dans le cadre des consultations pré-budgétaires. Nous vous recommandons de financer deux mesures précises, afin de répondre aux besoins réels des pompiers, de leurs familles et du public, et d'améliorer la sécurité publique. Ces mesures de prudence marqueraient l’engagement du gouvernement à l’égard de l’intérêt général des familles canadiennes et envers le dynamisme et la sûreté de nos collectivités.

De nombreux facteurs contribuent à la stabilité économique du pays. Comme précisé dans le budget de 2011, la deuxième phase du Plan d’action économique du Canada, la santé des familles ainsi que le dynamisme et la sûreté de nos collectivités sont d’importants éléments du potentiel économique du Canada et de la qualité de vie des Canadiens. C’est dans cet esprit que l’AIP a voulu faire deux recommandations au Comité.

Notre première recommandation tient à la création d'une prestation nationale d'indemnisation des agents de la sécurité publique (IASP) pour les familles des pompiers qui sont tués dans l'exercice de leurs fonctions. L’AIP propose une prestation de 300 000 $ qui serait versée directement aux membres survivants de la famille d’un pompier décédé ou devenu invalide permanent dans l’exercice de ses fonctions. Cette prestation est nécessaire pour assurer un niveau minimum de sécurité financière aux familles qui ont perdu leur principale source de revenus.

Dans notre seconde recommandation, nous demandons que le Comité reconnaisse les gains réalisés sur les coûts et le niveau de sécurité accru des pompiers et de la population, qui ont été rendus possibles grâce aux contributions du gouvernement du Canada à l’initiative de formation de l’AIP sur les matières dangereuses et les substances CBRNE, et qu’il suggère au gouvernement d’envisager une deuxième tranche quinquennale de financement du programme commençant durant l’exercice 2012-2013.

Recommandations

1. L’AIP demande au Comité permanent des finances de recommander au gouvernement du Canada de prévoir des fonds pour la création d'une prestation nationale d'indemnisation des agents de la sécurité publique (IASP) pour les familles des pompiers qui sont tués dans l'exercice de leurs fonctions.

Le métier de pompier est dangereux. Des études démontrent que c'est dans ce métier qu'on enregistre le taux le plus élevé de maladies et de blessures professionnelles, en raison des innombrables dangers que courent chaque jour les pompiers pour protéger la vie et les biens matériels des Canadiens.

Lors d'un appel, un pompier peut être tenu de pénétrer dans un bâtiment en flammes et endommagé ou dans d'autres espaces clos remplis d'émanations toxiques, de se rendre sur les lieux d’un accident de la route ou de répondre à une urgence médicale où il peut être exposé à des maladies infectieuses. En outre, plusieurs formes de cancer sont désormais reconnues comme des maladies professionnelles chez les pompiers.

Les pompiers sont conscients de ces risques lorsqu'ils décident d'embrasser cette profession. Ils savent également qu'ils sont la première ligne de défense du pays en cas d'attaque chimique, biologique, radiologique ou nucléaire en territoire canadien.

Les pompiers sont prêts à affronter ces dangers et à faire le sacrifice de leur vie sans hésitation pour sauver la vie et les biens matériels d'autres Canadiens.

Aux États-Unis, le gouvernement fédéral a adopté une attitude responsable et, depuis 1976, il administre une prestation d'indemnisation des agents de la sécurité publique (IASP). Cette prestation indexée est immédiatement accessible aux familles des agents de la sécurité publique qui sont tués ou qui deviennent invalides dans l'exercice de leurs fonctions.

Le gouvernement des États-Unis ne s’est pas retranché derrière des conflits de juridiction pour éviter d'instituer cette prestation. Il a reconnu que l'adoption de l’IASP était la chose à faire. La prestation est accessible à tous les agents de la sécurité publique, peu importe qu'ils travaillent pour une administration municipale ou pour le gouvernement fédéral. Fixée au départ à 50 000 dollars, la prestation indexée s'élève aujourd'hui à 318 111,64 $.

Il n'existe pas d'exemple plus éloquent du sacrifice que les pompiers sont prêts à faire au nom de leur pays que la tragédie du 11 septembre 2001, à New York. Lorsque les terroristes ont attaqué les États-Unis, ce sont les pompiers municipaux qui ont été les premiers à arriver sur les lieux du drame et à se précipiter dans les deux tours en feu, dans l'espoir de pouvoir encore sauver des vies. Malheureusement, 343 de ces pompiers ont fait le sacrifice de leur vie en ce jour tragique.

Devant un pays en deuil, les pensées se sont vite tournées vers les survivants, c'est-à-dire vers leurs familles qui, dans la plupart des cas, avaient perdu leur principal gagne-pain. Comment protéger la sécurité financière de ces familles? Qui allait s'assurer qu'elles seraient en mesure de faire face à leur fardeau financier dans le sillage de ces événements tragiques?

Fort heureusement, l’IASP américaine était là pour aider financièrement les survivants après les terribles événements du 11 septembre 2001. En fait, en octobre 2001, la prestation est passée de 154 199 $ à 250 000 $, avec rétroactivité au 1er janvier 2001, afin que les familles des agents de la sécurité publique qui ont trouvé la mort dans l'exercice de leurs fonctions le 9 septembre puissent bénéficier de l'augmentation.

Comme nous approchons du 10e anniversaire de la tragédie du 11 septembre 2001, il est plus que temps d’offrir une prestation semblable aux pompiers canadiens. Actuellement, il n’existe aucune norme nationale en matière d’indemnisation pour les familles des pompiers tués dans l’exercice de leurs fonctions. Dans ses démarches auprès du gouvernement fédéral du Canada, l’AIP s’est fait dire qu’étant donné que la plupart des pompiers sont employés par les municipalités, c'est à ces dernières qu'il incombe de leur offrir une forme d'indemnisation appropriée. Le fait est qu'à peine une minorité de pompiers professionnels ont réussi à négocier ce type de prestation et, dans bien des cas, il s'agit d'un montant symbolique qui suffit à peine à répondre de manière réaliste aux besoins d'une famille dans le deuil qui a perdu une importante source de revenus.

Pour les pompiers qui ont réussi à négocier une prestation de décès dans l'exercice de leurs fonctions, la prestation type équivaut au maintien pendant deux ans du salaire du pompier, ce qui permet au conjoint survivant et à la famille de rester dans la maison familiale pendant deux ans. Mais qu'advient-il ensuite?

Si un pompier meurt à l'âge de 43 ans - l'âge moyen des pompiers qui meurent dans l'exercice de leurs fonctions - même 300 000 dollars ne représentent qu'environ le quart du revenu que la famille aurait touché au cours des 17 années suivantes si ce pompier avait travaillé jusqu'à l'âge de 60 ans avec un salaire moyen.

La sécurité financière de la famille d'un pompier qui est tué ou qui devient invalide à titre permanent pour avoir sauvé la vie de Canadiens ne doit pas être remise en question, et elle ne doit pas dépendre des incertitudes qui entourent les négociations collectives ou le régime de la province dans laquelle il vit. La sécurité financière mérite une norme nationale équitable, c'est-à-dire un montant de base minimum qui sera versé à tous les pompiers, en plus de la prestation de décès dans l'exercice des fonctions à laquelle ils pourraient avoir droit localement.

Pendant la 38ème session du Parlement, le député NPD Peter Julian (Burnaby – New Westminster, C.-B.) a déposé le projet de loi M-153 à la Chambre des communes. Ce texte stipule que, de l'avis de la Chambre des communes, le gouvernement fédéral doit créer une prestation nationale pour les familles des pompiers tués ou devenus invalides permanents dans l'exercice de leurs fonctions.

Le projet de loi M-153 a été adopté par la Chambre des communes par 161 voix contre 112, ce qui prouve qu'une majorité de députés représentant une majorité de Canadiens reconnaissent qu'il est juste et opportun d'instituer une prestation IASP pour les familles des pompiers tués dans l'exercice de leurs fonctions.

D’un point de vue budgétaire, une prestation IASP de 300 000 $ coûterait au gouvernement canadien environ 7,7 millions de dollars par an, si l'on se base sur la moyenne actuelle de 18,6 pompiers et de 7 agents de police qui trouvent la mort chaque année dans l'exercice de leurs fonctions  au Canada.

La création d’une prestation nationale d'indemnisation des agents de la sécurité publique au Canada serait une manière appropriée de reconnaître le sacrifice consenti par un pompier qui meurt dans l'exercice de ses fonctions et d'assurer la sécurité financière de sa famille. Cette prestation devrait être fixée à 300 000 $ et être considérée comme une prestation directe et indexée pour la famille du pompier.

Tant qu’il n’y aura pas de prestation IASP au Canada, les familles des pompiers professionnels du pays continueront d’éprouver des difficultés financières en plus de la douleur d'avoir perdu un être cher. Il est temps que le gouvernement fédéral agisse et donne suite à l'adoption du projet de loi M-153 en instituant une prestation nationale IASP pour les familles des pompiers canadiens tués ou devenus invalides permanents dans l'exercice de leurs fonctions.

2. L’AIP demande au Comité permanent des finances de recommander au gouvernement du Canada au gouvernement d’envisager une deuxième tranche quinquennale de financement de l’initiative de formation de l’AIP sur les matières dangereuses et les substances CBRNE à la fin de l’exercice 2012-2013.

La sécurité publique demeure à l’avant-scène des préoccupations mondiales, récemment alimentées par les événements tragiques comme les séismes dévastateurs qui ont frappé le Japon et la Nouvelle-Zélande et les attentats à la bombe en Norvège. Nous ne devrions pas nier le fait que de tels événements peuvent se produire en sol canadien. Il est indispensable de réaliser d’importants projets de protection civile réalisés sur le terrain si l’on veut réduire les risques liés aux catastrophes.

Dans l’éventualité d’une attaque chimique ou bactériologique menée contre une ville canadienne, une réponse militaire pourrait prendre des heures et même des jours. Ce sont nos pompiers professionnels qui seraient les premiers à se rendre sur les lieux, en quelques minutes. Actuellement, seuls les pompiers de cinq provinces (l’Ontario, la Colombie-Britannique, la Nouvelle-Écosse, l’Alberta et la Saskatchewan) ont accès à la formation sur les substances CBRNE. En outre, si quelques villes comme Ottawa disposent d’équipes d’interventions d’urgence sur place en cas d’incidents impliquant des matières dangereuses ou des substances chimiques ou biologiques, la grande majorité n’en a pas, ce qui laisse la majorité des Canadiens complètement vulnérables face aux conséquences d’une attaque impliquant des dispositifs explosifs, biologiques, chimiques, nucléaires ou radiologiques. Une intervention inappropriée à un tel incident pourrait aggraver les répercussions potentielles sur la population et les pompiers qui interviendraient.

L’AIP a déterminé la nécessité d’une formation ciblée et a mis au point un programme de formation sur les matières dangereuses et les substances CBRNE pour les premiers intervenants. La formation vise à compléter les initiatives fédérales existantes et à renforcer considérablement le nombre d’intervenants de première ligne en mesure de protéger les Canadiens en cas d’attentat terroriste impliquant des matières dangereuses ou des substances CBRNE.

Dans le budget de 2007, le gouvernement fédéral avait reconnu l’importance de ce programme et avait octroyé un financement quinquennal dédié à la formation sur les matières dangereuses et les substances CBRNE pour aider à préparer les pompiers à intervenir en cas de tels incidents.

Ce programme s’est révélé extrêmement fructueux. Jusqu’à maintenant, l’AIP a consacré 33 448 heures à la formation technique et a réussi à former un total de 977 premiers intervenants à travers le Canada, dont des pompiers professionnels et des pompiers volontaires, des policiers, des membres d’équipes de recherche et de sauvetage et d’autres types d’intervenants. La poursuite de ce programme est essentielle pour étendre notre formation aux autres provinces et territoires. Une deuxième tranche de financement permettrait d’accroître le nombre de premiers intervenants formés de manière adéquate à un niveau approprié d’intervention en cas de déversement de matières dangereuses dans un plus grand nombre de communautés à travers le Canada. Et puisqu’il s’agit d’une approche de formation des formateurs, les effets du programme sont multipliés de manière exponentielle.

L’AIP est déterminée à maximiser le rapport coût-efficacité du programme en continuant à utiliser les ressources déjà en place. À cet effet, pratiquement 100 % des fonds fédéraux serait consacré à la formation existante. En outre, il n’y aurait pas de frais de déplacement substantiels puisque les formateurs donnent le programme localement. Vu sous l’angle de l’économie nationale, l’accès à des ressources adéquates relativement à des déversements de matières dangereuses permettrait de maîtriser des catastrophes pouvant constituer une menace pour la santé et la sécurité de la population, nos infrastructures et nos ressources naturelles. Une formation rigoureuse des ressources les plus actualisées et des capacités locales en matière d’intervention permettrait de minimiser les coûts potentiellement faramineux des dégâts.

C’est en gardant à l’esprit les points susmentionnés que l’AIP demande au gouvernement fédéral de prévoir une deuxième tranche quinquennale de financement de l’initiative de sa formation sur les matières dangereuses afin de permettre aux premiers intervenants canadiens de réagir efficacement et en toute sécurité aux actes de terrorisme. La poursuite de ce programme serait pour le gouvernement fédéral une façon intéressante de s’attaquer à ce problème qui est d’une importance capitale pour la vie et la sécurité de tous les citoyens canadiens.

Les recommandations de l’AIP pour le prochain exercice budgétaire sont pertinentes à l’objectif du gouvernement fédéral de garantir une prospérité partagée et un niveau de vie élevé pour tous les Canadiens, puisque la santé, la sécurité et le bien-être de nos concitoyens seraient efficacement protégés en toute circonstance. Cela assurerait aussi aux pompiers professionnels et à leurs familles un niveau minimum de sécurité financière s’ils étaient tués ou devenus invalides permanents dans l’exercice de leurs fonctions.

L’AIP est heureuse d'avoir eu l'occasion de faire connaître son point de vue au Comité permanent des finances, dans le cadre des consultations pré-budgétaires, et elle espère pouvoir en discuter de vive voix avec le Comité au cours des audiences prévues cet automne.

Scott Marks

Adjoint au président général des opérations canadiennes de l’AIP

Bureau canadien de l’AIP

403-350, rue Sparks

Ottawa (Ontario) K1R 7S8

(613) 567-8988